Bounama Camille Sylla: Paris en tête, Tamba au cœur

Jeune Sénégalais, 26 ans, sans papier en France, mais Bounama Camille Sylla est rempli d’idées. Président de l’Association Monde des idées et des actions, son projet AlloTamba qu’il voulait pour sa ville devient ArtéCités, un tremplin pour les talents des banlieues françaises, en collaboration avec la chaîne française Arte. Bounama, à qui le Président Wade aurait commandé 3 000 Cd, peine à entrer dans ses fonds.


« Le départ est le seul horizon offert à ceux qui cherchent les mille écrins où le destin cache les solutions de ses mille erreurs », écrit Fatou Diome dans les dernières lignes de son roman Le ventre de l’Atlantique. A Bounama Camille Sylla, Sénégalais né il y a 26 ans à Tambacounda, le destin lui a souri en France, sans pour autant lui cacher ces fameuses erreurs. Là-bas, en France, elles ont pour nom « sans-papiers », « racisme » ou encore « manque de reconnaissance ».

Et pourtant, celui dont le père croyait qu’il allait en France pour y faire de grandes études, aveuglé en cela par la reconnaissance que ses ancêtres pensaient trouver pour les bons et loyaux services des tirailleurs comme son grand-père, Bounama a réussi à faire son trou dans les milieux musical et associatif, entouré à Paris de deux de ses frères et de sa grande sœur.

Il est arrivé il y a 7 ans, en 1999, débarquant de sa terre tambacoundoise, limitrophe de cinq pays, d’où un métissage revendiqué : il parle Peul, Bambara, Soninké ou encore Wolof. Entré tard à l’école comme bon nombre de ses jeunes concitoyens, il a fait ses valises pour l'Europe après son brevet. Sans carte d’étudiant et avec un visa touristique en poche, il avait à l’époque 19 ans.

Ses premiers emplois sont ceux du secteur très développé en France… De la débrouille. Il est agent de la sécurité puis employé dans un magasin de photocopies à Censier Daubenton (station de métro du 5ème arrondissement de Paris, Ndlr). « Après, j’ai rencontré un gars qui s’appelle Talib Larsen qui m’a pris comme gérant dans un cyber café à Montigny-lès-Cormeilles », raconte Bounama Sylla. « C’était bien au début, mais de jour en jour, cela devenait de plus en plus dur. (…) Le tiers monde, je ne l’ai pas connu en Afrique : je l’ai connu en France... » Entendez par-là les galères, le manque de considération et « les gens qui te parlent mal »…

Au pays, « tu es chez toi, tu es Sénégalais, tu n’es pas rejeté », rappelle-t-il. Alors qu’il arrivait un soir très tard à cause de perturbations dans les transports, il a eu le déclic, celui qui allait tout changer. « Ce soir-là, j’ai vu tous les jeunes qui traînaient, il faisait froid. J’ai dit : ‘’on a quinze ordinateurs… Pourquoi je n’organiserai pas une soirée de jeux pour ces jeunes » ? » Et ça a marché. Au point qu’ils ont été obligés d’agrandir et de demander l’ouverture de la salle la nuit. C’était il y a 3 ans.

Allo Tamba
Cette réussite ne sera pas la seule : « Je s uis parti peu de temps après à Bastille et (…) j’ai vu un bus de Arte (chaîne de télévision française, Ndlr) et, dans ce bus, j’ai trouvé une femme qui donnait des places de cinéma. » Après avoir sympathisé, Véronique Lamagnère donnera au cyber 3 000 euros (Environ 2 millions Cfa) en échange de spots de publicité à passer sur les écrans. Grâce à la curiosité du Sénégalais, le cyber va encore se développer et les contacts de Bounama aussi.

« Mon rêve depuis toujours, c’était d’organiser un grand festival pour ma ville, pour Tambacounda. » Car à chaque fois que Bounama quittait Tambacounda, il ne voyait que très peu d’activités. Bounama voulait notamment permettre l’ouverture d’un grand cyber café géré par les jeunes de Tamba et produire des cassettes audio dans les cinq langues qu’il parle sur la prévention du Sida et les distribuer gratuitement. « Voulait » seulement, car le rêve ne s’est pas réalisé. « Pour financer ce projet, faire connaître ma ville », il a sorti un Cd appelé AlloTamba et a « demandé à tous les artistes de chanter Tambacounda ».

Et pas n’importe lesquels : grâce à ses connaissances dans le milieu de la musique, il a fait venir, entre autres, Mokobé du 113 et Princess Aniès. Il faut remonter à ses années sénégalaises pour y trouver déjà, à l’âge de 16 ans, le virus de la musique. Mc Bouna, à l’époque son nom de rappeur, avait monté un petit festival en 1996 avec quelques autres Mcs qui deviendront connus par la suite. Ils s’appelaient Black Bolo, Be Pastef …

Bounama court toujours derriere l'argent promis par Wade
Pour que son rêve se réalise, il est allé voir les autorités sénégalaises. « Je me suis rendu compte que l’on était en train de faire un travail qu’ils devaient faire » pour contribuer au développement de notre pays. Mais, ironie de l’histoire, c’est en France qu’il trouvera le soutien le plus fort : plusieurs mairies -dont La Courneuve ou Cergy-Pontoise- ont tout de suite été intéressées par l’idée.

« J’ai eu la chance de rencontrer le président de la République, Abdoulaye Wade. Il m’a reçu il y a un an et demie (à Paris, Ndlr). Il y avait Madame Wade. A ce moment le Cd n’était pas encore sorti. » Une commande du Président Wade de lui acheter 3 000 exemplaires et de prendre en charge une partie des frais pour la mise en place du festival et tout semblait lancé. « J’ai vu une sincérité, dit-il à propos de Maître Wade. Mais quand le Cd est sorti, je suis parti voir l’ambassadeur et je lui ai donné à peu près une dizaine de Cd », ainsi qu’à d’autres conseillers du Président. « Mais depuis lors, je n’ai pas eu la chance de [le] voir. Je suis sûr que le Président n’était même pas au courant que le Cd était sorti… (…) S

Si je l’avais vu, je suis sûr que le projet aurait pu avoir lieu à Tambacounda. » Bounama a même revu Viviane Wade, « enchantée et étonnée » de voir qu’ AlloTamba était sorti : « Je lui ai tendu le Cd et elle m’a dit : ‘’Le président va être très très content’’…»

Contrairement à ce que l’on a dit sur cette affaire, c’est une fois de plus l’entourage qui est en fait mis en cause, et non Maître Wade lui-même. « Ils n’ont rien dit au président… », se désole Mc Bouna.

L’ambassadeur du Sénégal en France qui, comme d’autres autorités, n’aurait pas relayé ces informations au niveau de la Présidence, selon Bounama, tempère l’ardeur de ce dernier : « S’il veut une entrevue, il doit adresser un courrier comme tout le monde. »

Quant à la sortie des disques, Doudou Salla Diop dit « ne pas être au courant de cette histoire ». « On ne peut pas distribuer des millions pour acheter des disques comme cela ! », ajoute l’ambassadeur. Manque de communication d’un côté ou de l’autre, toujours est-il que la première édition du festival a eu lieu, mais en France. C’était le 2 juillet 2005, dans la grande salle de l’Unesco, avec une projection du film Madame Brouette de Moussa Sène Absa et un concert de clôture.

« Si seulement ces 3 000 disques avaient été achetés… Ils m’ont retardé vraiment sur le projet AlloTambacounda », répète Bouna ma Camille Sylla, qui n’en démord pas. Sa revanche, il l’a eu au Festival des cultures urbaines le lundi 1er mai à la Foire de Paris et ses 100 000 visiteurs. Sylla et son association « Le Monde des idées et des actions », dont il est le président, ont monté le concert AlloTamba avec notamment Omar Thiam et Prin cess Aniès. Dénommé « Arte Cités », ce projet s’insère en fait dans un partenariat avec Arte, un tremplin pour les talents des banlieues françaises nommé.

Mon pays ne m'aide pas
La morale de l’histoire pour Bounama est simple : « Tu fais une manifestation, tu appelles les communes en France pour Tambacoun da, elles viennent tous. Les autori tés de ton pays ? Il n’y a personne qui vient… Qui nous représente ? » Et Bounama devra continuer tout seul. Il continue les contacts avec la Présidence de la République du Sénégal, notamment par le truchement de Mme Mbaye, secrétaire de Me Wade.

En vain, dit-il, car « les promesses fermes qu’elle m’a tenues n’ont abouti à rien. Pire j’ai l’impression qu’on ne voulait plus me voir, on me fait courir’’. Même lors de la semaine culturelle du Sénégal à Paris où Wade recevait le Prix Houphouët-Boigny, une autre échéance qui lui avait été donnée, il n’en sera rien. Jusqu’à présent, Bounama court toujours derrière ses sous : 45 000 euros (environ 29 millions Cfa), évalue-t-il.

« Mon pays ne m’aide même pas. (…) Mais le plus important pour moi, c’est Tambacounda. Et je le ferai. »

Source: Xalima.com

1 commentaire:

Anonyme a dit…

J'apprends depuis peu à te connaitre et si seulement si...Certaines personnes ont des idées et d'autres des IDEES et toi tu as des IDEES, ton combat est noble et tu y arriveras, ne t'en fait point.Notre pays a besoin de nous et il devra bien compter sur sa force vive.Nul n'est sans le savoir que nous sommes en 2009 après J.C et le Sénégal dois se réveiller et arréter de bricoller meme si la mission et rude. Mettons nos idées et nos forces dans du concret et arrettons de bricoller.Meme si la tache reste difficile le Sénégal dispose d'assez matiere grise pour faire face aux défis du 21eme siècle." Confiez nous une mission,et nous l'accomplierons!" Continu notre combat. Laye Diako "BIEN FAIRE,LAISSER DIRE..."

 
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