Banque mondiale - Mémorandum économique: Le rapport qui met à nu les carences du Sénégal

La Banque mondiale va présenter dans un hôtel de Dakar son «Mémorandum économique» sur le Sénégal. Dans ce rapport intitulé "Sénégal - A la Recherche de l’emploi - Le chemin vers la prospérité?" , il ressort clairement que l’économie sénégalaise ne se porte pas aussi bien que les autorités veulent le faire croire.

Le Sénégal a une économie «fragile», enfermée par la pauvreté et handicapée par la faiblesse des exportations. Ce qui n’est pas sans incidence sur le marché de l’emploi, où la grande majorité des travailleurs sont dans une situation difficile. Une précarité accentuée par l’importance du taux d’inactifs, qui frôle les 40%. Le document révèle en même temps que le peu de Sénégalais qui ont la chance d’accéder à un emploi sont généralement mal protégés. Les carences du système éducatif n’ont pas été épargnés par les experts de la Banque mondiale qui, dans un «agenda de réformes», ont préconisé une série de solutions censées sortir le Sénégal de ses difficultés.

Au-delà des réalisations: Une performance très fragile
Lors de la réunion du Groupe consultatif pour le Sénégal à Paris, le gouvernement a bien pris le soin de mettre en avant, à chaque intervention d’un de ses membres, la performance macroé-conomique du pays. Certes, il n’est pas à nier que l’économie sénégalaise, en comparaison avec d’autres pays de la sous-région, aussi bien que dans une perspective historique, a réalisé une performance satisfaisante. Par exemple, au cours de la période 1995-2004, le taux de croissance moyen a avoisiné 5% par an. La forte augmentation des investissements publics et l’afflux de capitaux étrangers, qui se sont multipliés par 5 entre 1995 et 2005, sont pour beaucoup dans ce résultat. Mais dans son «Mémorandum économique» édité en septembre, la Banque mondiale n’y est pas allée par quatre chemins pour marquer les limites de cette performance. Le rapport révèle que, malgré toutes les annonces en grande pompe des autorités sénégalaises, cette performance économique reste «très fragile». Diagnostic : «Encourageant… mais fragile.»

Le document de la Banque mondiale souligne que cette fragilité est illustrée à travers «les chutes brutales de la croissance économique en 2002 et en 2006 lorsque l’économie a subi des chocs extérieurs, amplifiés pour la dernière année par la crise au sein de la grande industrie locale (Ics)». Certes, la fragilité de la croissance économique au Sénégal est encore différente de celle de nombreux pays africains. Mais, nuance la Banque mondiale, ces pays ont connu «des affres d’une plus forte instabilité politique et une plus forte dépendance aux ressources naturelles».

Mais qu’est ce qui rend si vulnérable l’économie du Sénégal, alors que le pays est présenté comme politiquement stable ? La situation, répond l’institution financière internationale, «provient principalement de sa (de l’économie : Ndlr) dépendance vis-à-vis de la politique budgétaire et de l’afflux de capitaux étrangers, ainsi qu’à sa forte concentration sur un nombre réduit de secteurs économiques». Les causes de la vulnérabilité de l’économie sénégalaise sont aussi à trouver dans la décomposition de l’offre globale. En effet, indique le rapport, «la moitié de la croissance économique s’est concentrée autour de cinq secteurs sur 40, pendant la période 1995- 2004, avec par ordre décroissant d’importance: le commerce, qui contribue pour 18% à la croissance du Pib en dehors de l’administration publique, les postes et télécommunications (9%), l’agriculture (8%), la construction (7%), et les activités immobilières (6%)».

Il faut souligner que ces secteurs, à l’exception des télécommunications, sont «intenses en main d’œuvre». Selon le partenaire au développement, «cette dépendance traduit le manque de ressources naturelles et confirme que l’avenir de l’économie sénégalaise sera largement tributaire de sa capacité à créer des emplois à haute valeur ajoutée qui lui permettront d’améliorer sa compétitivité, an particulier sur les marchés internationaux».

Faiblaisse des importations et predominance de la pauvrete
Concernant les exportations, on savait déjà que ce secteur constitue l’un des parents pauvres de l’économie sénégalaise. On note ainsi une faible participation des secteurs exportateurs à la croissance économique du pays. C’est là que réside justement le paradoxe de l’économie sénégalaise. Car, en principe, la croissance économique d’un pays est basée sur ses exportations. Et le rapport de constater que «le manque des exportations sénégalaises contraste d’ailleurs avec l’expérience des pays en de développement qui ont réussi leur transition vers l’émergence économique». En guise de comparaison, le document renseigne que les tigres et dragons d’Asie, la Tunisie, l’Ile Maurice et le Chili, ont tous vu leurs exportations croître plus rapidement que leur revenu national au cours des dernières décennies (par exemple jusqu’à trois fois plus vite en Corée du Sud). Ainsi, en décryptant les causes de la fragilité économique du Sénégal, les experts de la Banque mondiale soutiennent que la pauvreté y représente une bonne part. En dépit des progrès réalisés, le Sénégal reste «un des pays les moins avancés avec non seulement un revenu moyen par habitant autour de 710 dollars en 2005, mais avec plus de la moitié de la population qui n’a pas les ressources financières suffisantes pour acheter un panier minimal de subsistance». Sous ce rapport, le document est en tous cas formel : «L’étendue et la permanence de la pauvreté empêcheraient le Sénégal de décoller et d’atteindre des taux de croissance économique qui le propulseraient vers l’émergence.»

C’est aussi connu, le gouvernement vise à atteindre une croissance soutenue et équitable. Mais pour y arriver, préconise le rapport, les autorités doivent être capables d’«améliorer l’efficacité de la politique budgétaire et encourager le développement du secteur privé par la mise en place des conditions favorables à son essor (climat des affaires transparent, infrastructures, etc.)». Des objectifs qui seront difficilement atteints sans un marché du travail efficace.

Source: Le Quotidien

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