La prostitution masculine africaine en Europe

La prostitution africaine en Occident ne touche pas uniquement les femmes. Les hommes sont, eux aussi, touchés par le phénomène. Leur milieu revêt ses propres spécificités, comme le fait que des pères de famille s’adonnent plus ou moins clandestinement à ces activités ou que des hétérosexuels consentent à des pratiques homosexuelles.

Amély-James Koh Bela, auteur du livre La prostitution africaine en Occident, nous plonge au cœur d’un système méconnu, tenu par l’argent, la drogue et les pressions familiales.

Quels types de pratiques retrouve-t-on dans la prostitution masculine africaine en Occident ?
Amély-James Koh Bela : Comme pour les femmes, on retrouve beaucoup la zoophilie (rapports sexuels avec des animaux, ndlr), de même que les fantasmes pédophiles. Plus classiquement, on retrouve tous les types de pratiques homosexuelles, qui sont très développées. Le plus souvent pourtant, ces prostitués sont parfaitement hétérosexuels et même des pères de famille.

On a du mal à concevoir que des hétérosexuels s’adonnent à une prostitution homosexuelle !
Amély-James Koh Bela : Les hétérosexuels qui acceptent des pratiques homosexuelles n’ont qu’une seule et unique motivation : l’argent. Tous sont dans des situations économiques difficiles et la prostitution homosexuelle intervient alors en dernier recours. En effet, le métier de « gigolo » rapporte moins.

Qu’est ce qui différencie un gigolo d’un prostitué ?
Amély-James Koh Bela : Il existe bel et bien une différence : le prostitué peut avoir des rapports homosexuels, zoophiles, hétérosexuels, etc. Le gigolo, lui, ne s’occupe que des femmes.

Quelle est la pratique la plus courante en matière de prostitution masculine africaine en Occident ?
Amély-James Koh Bela : La mode en ce moment, et la pratique la plus répandue, c’est le jeune black que va payer un couple pour faire l’amour à la femme. Le fantasme du « black bien monté » perdure toujours. Il existe même maintenant des codes sur Internet, dans les journaux gratuits, dans les petites annonces où des couples recherchent un ou plusieurs jeunes Africains pour se payer leurs services. Un, deux, trois ou plus s’activent sur la femme pendant que le mari regarde. Dans cette relation se développe un rapport de maître à esclave : le mari dit quoi faire, comment faire, donne des ordres, mais interdit formellement au jeune de se finir dans sa femme ou sur elle. Cela est ressenti comme une humiliation par ces jeunes car l’homme devient une machine.

Qu’en est-il des gigolos, dont on peut également considérer l’activité comme de la prostitution puisque les hommes se font payer pour leurs prestations sexuelles ?
Amély-James Koh Bela : En ce qui concerne les gigolos à proprement parler, ils sont abondants en France où ils évoluent notamment dans les milieux bourgeois, là où les femmes aisées recherchent les « petits blacks ». Au fur et à mesure, des réseaux se forment. D’ailleurs, ce système connaît un tel succès que les salaires sont en augmentation depuis 2 ans. La passe est à 100 euros, mais il faut aussi compter l’entretien comme les voyages, où la femme emmène le jeune avec elle, par exemple. Beaucoup de jeunes Africains ont recours à ce système, car selon eux, ils font une bonne affaire. En effet, ils considèrent comme une aubaine de coucher avec des femmes et d’être payés pour.

Et en ce qui concerne les pratiques zoophiles dans la prostitution masculine africaine ?
Amély-James Koh Bela : C’est un secteur prospère, comme chez les Africaines. Des grilles de tarifs ont même été instaurées. Par exemple, il y a une différence entre les tournages vidéo commerciaux et privés de zoophilie. Les tournages privés (chez des particuliers, ndlr) se déroulent jusqu’à plusieurs fois par semaine et rapportent énormément au prostitué. Les tournages commerciaux, eux, sont ponctuels : une fois par semaine, par mois, ou autre.

Les prostitués qui s’adonnent à ces pratiques sont-ils tous consentants ?
Amély-James Koh Bela : Comment pensez-vous qu’un homme normalement constitué puisse se donner à un chien ? Ces gens se droguent car certaines pratiques sexuelles ne peuvent pas se faire sans, ne serait-ce que pour lutter contre la douleur ou se donner une raison de le faire. Et au fil du temps malheureusement, la dépendance s’installe. Il existe aussi une véritable dépendance financière. Ces hommes deviennent accros à l’argent en dépit de la destruction du corps et de l’esprit. Ils sont déprimés, ont honte mais continuent car l’apport économique est très important. Cela peut aller jusqu’à 5 000 euros par semaine au minimum pour certains. Comparativement au Smic (Salaire Minimum Interprofessionnel de Croissance, aux alentours de 1 100 euros par mois, ndlr), il n’y a pas photo.

Le facteur argent est omniprésent dans ce trafic ?
Amély-James Koh Bela : Oui, c’est sur l’argent que tout repose, pour les prostitués comme pour les macs. Mais comme je vous l’ai dit, les raisons de cette prostitution sont avant tout économiques, car les conditions de vie européennes sont difficiles, surtout lorsque l’on n’a pas de papiers, pas de travail, pas de logement. Il faut dire que ces jeunes Africains ont souvent été lâchés à leur arrivée par leurs « frères », ceux-là même qui les avaient ramenés du pays.

Existe-t-il des réseaux de prostitution masculine ?
Amély-James Koh Bela : Bien sûr ! Cette prostitution fonctionne à l’identique de celle des femmes. C’est un cercle vicieux : plus les prostitués agrandissent leurs cercles de clientèle, plus ils ont besoin de « main-d’œuvre ». Pour cela, ils amènent directement des frères d’Afrique, ou c’est leur proxénète, s’ils en ont un, qui s’en occupe. Il fait des faux papiers, fait venir les prostitués par dizaines de tous les pays, briefe sur le travail à venir, forme par des séances vidéos de deux ou trois jours, trouve les clients, et bien entendu, prend sa part sur le salaire. Les violences peuvent être très graves si les jeunes se rebellent ou volent de l’argent. Cela peut même aller jusqu’à l’assassinat.

Y a-t-il un profil type du prostitué africain ?
Amély-James Koh Bela : Les plus jeunes ont entre 16 et 20 ans, et sont vieillis sur les papiers lorsqu’ils n’ont pas l’âge légal en France. Mais il existe tous les âges chez les prostitués. J’ai même vu des papas de 55 ans. Souvent, ils sont pères de familles, mais en général, la famille ne sait pas qu’ils se prostituent. Leur activité est souvent cachée par un « emploi » comme des petits travaux de jardinage, de ménage, de maçonnerie, etc. Ce qui permet de ne pas changer leurs habitudes de vie aux yeux de leur famille. Dans d’autres cas, les femmes assument le travail du mari et sont parfois elles-mêmes issues de ce milieu. L’ampleur de ce trafic est vraiment très grande et touche toutes les nationalités : Maliens, Camerounais, Ivoiriens, Congolais, Ghanéens, etc. Tous sans exception.

Comment ces hommes en viennent à vous contacter ?
Amély-James Koh Bela : Généralement, j’entre en contact avec eux après une délation. Mais les prostitués viennent aussi nous voir d’eux-mêmes après avoir été informés par des femmes prostituées. En effet, les deux milieux communiquent. Ils entrent parfois en contact avec les Organisations Non Gouvernementales, dont Aides Fédération, pour des problèmes de domiciliation ou de papiers et y découvrent au final un lieu d’écoute, de parole. Pourtant, les prostitués ont beaucoup de difficultés à se confier à moi car je suis une femme. La première réaction est souvent agressive, violente, du genre : « arrêtes de me faire la leçon, tu sais mieux que nous à quel point c’est difficile ». Alors j’essaie de me positionner en tant que mère ou grande sœur et les mots commencent à sortir. Les pleurs aussi. Tous refusent le mot « prostitution ». Pour eux, il s’agit d’un « sacrifice », de « débrouille », mais ils estiment ne pas avoir d’autre choix.

Rencontre-t-on la même détresse chez les prostitués hommes que chez les femmes ?
Amély-James Koh Bela : La détresse physique et psychologique est la même pour tous. Certes les violences au cours de l’acte et les mutilations physiques sont plus marquées chez les femmes, mais il faut reconnaître que la sodomie pour un hétérosexuel est aussi une forme de mutilation. Ajouté à cela les pratiques zoophiles, l’humiliation, la drogue et les conditions de vie terribles dans lesquelles ils vivent, tout cela rend ces gens très vulnérables, profondément atteints dans leur être. Ce sont des personnes en grande demande de soutien.

Pourquoi ne décident-ils tout simplement pas de décrocher et de rentrer au pays ?
Amély-James Koh Bela : Retourner au pays représenterait une grande honte pour la famille là-bas. D’ailleurs, celles-ci font peser une pression immense sur les enfants, dont certains ont des diplômes. Ce sont les aînés et ils ont des responsabilités devant leur famille qui les attend et compte beaucoup (trop) sur eux.

Les familles sont-elles au courant de l’activité de leurs enfants ? Amély-James Koh Bela : Il y a quelque temps, les familles étaient dans le flou, certaines savaient, d’autres pas. Mais aujourd’hui, les familles sont, en majeure partie, au courant de l’activité des enfants. Le problème, c’est qu’elles ne voient que l’argent que cela rapporte les incitent soit directement, soit implicitement à continuer à se prostituer. La famille, à cause de cette complicité active ou passive qu’elle entretient, agit ici comme une sorte de proxénète.

Source: Afrik.com

2 commentaires:

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