Évaluation des 5 ansdu Fnpj: Entre «impunité» et gestion «pernicieuse»

La promotion de l’insertion des jeunes risque de prendre un sale coup. Une évaluation faite par Rosnert Ludovic Alloussini du cabinet Groupe de recherche d’étude et formation (Gref) sur la gestion de 2001 à 2006 du Fonds national de promotion de la jeunesse (Fnpj), révèle des « dysfonctionnements néfastes » et des « irrégularités criardes » qui l’ont mis dans un état désastreux. A l’origine, les politiciens qui ont utilisé le fonds comme instrument de propagande politique.

« Impunité et pernicieux ». Deux mots qui résument les cinq dernières années de gestion du Fonds national de promotion de la jeunesse (Fnpj). Le résultat « provisoire » d’une étude portant sur l’évaluation du Fonds et qui a été restitué ce mercredi 26 décembre à Dakar, soulève les signes d’une gestion gabégique accentuée par un amateurisme et un clientélisme sans som. Le consultant, Rosnert Ludovic Alloussitin du cabinet Groupe de recherche d’étude et formation (Gref) qui a fait l’étude a conclu que : « pendant cinq ans, le Fnpj a été soumis à des dysfonctionnements néfastes et à des irrégularités aussi criards qu’impunis ». A son avis, malgré sa pertinence avérée, « le Fnpj a une efficacité mitigée ». Ce qui, d’après lui, fait que la pérennité était compromise au départ avec un impact difficile à situer et une dimension genre insuffisamment prise en compte.

Le diagnostic fait sur les cinq années d’exercice du Fnpj se résume par six milliards de FCfa d’investissement, 2300 projets financés et 13 mille emplois créés. Le taux de recouvrement de mutuelles vers Fnpj tourne aux environs de 25 % alors que le remboursement des promoteurs vers les mutuelles était à 45 %. Un bilan qui, d’après le ministre de la Jeunesse, « est important mais insuffisant compte tenu de la demande nationale. » Pour les cinq premières années, l’étude révèle que les secteurs les plus sollicités sont le commerce, les services et l’agriculture. La répartition régionale des bénéficiaires met Dakar en pôle position, suivie de Ziguinchor et Kolda. L’étude montre que la dimension-genre n’a pas été prise en compte dans l’allocation des ressources parce qu’il y a eu plus de bénéficiaires garçons que de fille. A cela, l’étude ajoute qu’il y a des jeunes de moins de 18 ans ainsi que des vieillards qui ont eu à bénéficier des jeunes.

« Impunité suspecte de l’État »
Ainsi, la décadence du fonds est ainsi scindée en trois étapes. L’étude révèle que de 2001 à 2004, il y a eu un volontarisme excessif avec des financements qui ont été accordés sans tenir compte des mécanismes de suivi et recouvrement. Selon le consultant, « les gens étaient beaucoup plus préoccupés par la tenue de promesses électorales que de gestion de deniers publics. La période 2004-2006, est conçue comme celle de la désinvolture ». Rosnert Ludovic Alloussitin estime que c’est la période qui a enregistré des dysfonctionnements graves qui ont détourné le Fnpj de son objectif. Ce postulat du consultant contredit les affirmations du ministre de la Jeunesse, Mamadou Lamine Keïta qui, en marge de l’ouverture de l’atelier de restitution, a nié l’influence de la politique dans les financements du Fnpj.

Mamadou Lamine Keïta faisait croire que « les jeunes du parti (Nrlr : PDS (Parti démocratique sénégalais) nous reprochent qu’ils sont lésés parc qu’il y a peu d’entre eux qui ont bénéficié du Fnpj ». M. Keïta défend que : « le Fonds est là pour toute la jeunesse. Nous sommes à la disposition de tout journaliste qui veuille faire cette vérification. On lui donne la liste des bénéficiaires pour qu’il aille vérifier leur identité’’. Seulement, le consultant, dans son exposé, n’abonde pas dans le même sens que le ministre de la Jeunesse. Selon Rosnert Ludovic Alloussitin, l’étude montre l’irruption de la politique politicienne dans le champ du Fnpj. »Des politiciens ont effectivement protégé des promoteurs qui ont refusé de payer.

Beaucoup de jeunes qui ont été financés pensaient que le Fnpj est un instrument de propagande politique. A cela, il a ajouté que la tutelle qu’est le ministère de la Jeunesse n’avait pas laissé beaucoup d’autonomie au fonds. Le cabinet évaluateur a, par ailleurs, dénoncé ce qu’il appelle une « impunité suspecte » de l’Etat. »Il y avait une impunité suspecte avec l’Etat qui n’avait pas réagi à temps alors qu’en 2004, la Cour des Comptes parlait déjà d’une gestion défaillante, de mauvaise tenue de la trésorerie". A l’en croire, les gens n’étaient pas sanctionnés et c’est pour cela qu’ils ont continué à faire ce que bon leur semblait.

Les mutuelles débitrices sur le banc des accusés
Le comportement des mutuelles de crédit qui étaient au milieu du dispositif Fnpj-Promoteures, a été très contesté aussi bien par les autorités que par le consultant. Le schéma qui était dessiné conférait aux mutuelles le rôle de collecter les demandes pour les faire parvenir au Fnpj et elles servaient également de banque pour les promoteurs. Donc, c’était à elle de distribuer et de recouvrir les fonds que le Fnpj destinait aux promoteurs. Une tache qui, selon certains observateurs, n’a pas été respectée. Selon le ministre de la Jeunesse, le maillon faible du fonds a été le recouvrement du moment que les remboursements devaient servir au financement des autres projets en attentes.

A en croire Mamadou Lamine Keïta, auprès de certaines mutuelles, il est constaté que la démarche adoptée n’est pas conforme à ce qui est arrêté. « Certaines mutuelles retardent le versement des remboursements entraînant ainsi la mise en œuvre des projets des jeunes promoteurs ». Le ministre de la Jeunesse d’ajouter que : « certaines mutuelles utilisent l’argent destiné aux promoteurs à d’autres fins ». Le consultant Rosnert Ludovic Alloussitin qui a confirmé la faiblesse du taux de recouvrement a avancé qu’il y a même des fonds alloués à des mutuelles et dont on a perdu la trace.

Il impute cet état de fait à une défaillance du service chargé du porte-feuille Une observation qui, aux yeux du consultant, confirme l’amateurisme qui a caractérisé la gestion administrative du Fnpj. Selon lui, "de 2004 à 2006, le fonds a fonctionné de façon « bourgeoise » avec un service au ralenti. Pour Rosnert Ludovic Alloussitin, l’échec du Fnpj s’explique en parti par l’inadéquation du profil d’administrateur choisi sans tenir compte des compétences requises.

La relance par le petit crédit
L’heure est maintenant au nouveau départ. Selon le consultant, de juin à juillet 2006, une phase du redressement a été enclenchée. Il a ainsi félicité l’actuelle équipe qui, d’après lui, a mis une administration performante avec la reprise des réunions du comité de gestion et des missions de suivi qui ont repris du service. Entre autres actions menées dans cette dynamique, Rosnert Ludovic Alloussitin, évoque la reconstitution des États financiers et une forte pression menée sur les mutuelles débitrices. Sur ce sujet, il annonce que le procureur de la République a été saisi et des huissiers de justice mobilisés pour le recouvrement. Mamadou Lamine Keïta a fait savoir qu’il a instruit l’ordre de rayer les mutuelles tortueuses de la liste et même de porter plainte. « Nos avocats ont entamé une procédure dans ce sens ».

Le consultant fait savoir que « cette opération a permis le recouvrement de 200 millions de FCfa en une année ». Dans la politique de relance, les responsables du fonds ont changé de fusil d’épaule. Ils ont décidé de miser sur le petit crédit afin de toucher le maximum de jeunes avec des taux très faibles. A en croire, le consultant, la mobilisation du fonds de garantie a été effective dans le but de permettre aux jeunes d’accéder à d’autres financements. Pour M. Alloussitin, la relance doit être assise sur des principes dynamiques établis sur la culture du résultat, le retour à l’orthodoxie financière, le suivi systématique, l’évaluation externe annuelle, la culture du moindre risque, la sanction des irrégularités, la décentralisation…

Il pense que les acteurs de cette relance doivent être l’État, les banques et autres réseaux de mutuelles, le Fnpj, les promoteurs. Pour régler le problème du recouvrement, il appelle à un abandon des Structures de micro-finance (Sfd) qui, selo, lui, sont « moribondes ». A son avis, il est temps de créer une mutuelle des jeunes avec des gens imprégnés et préoccupés par les difficultés des jeunes. M. Alloussitin pense ainsi que le dispositif de la relance doit reposer sur le partenariat avec les Sfd classiques, le recours aux banques et aux grands réseaux de mutuelles dotée de capacités financières et techniques.

Source: seneweb

Aucun commentaire:

 
{http://www.leboytown.blogspot.com/}.