Decouverte: Jean Racine, ivre de sons

Jeune premier nouvellement débarqué dans l’univers de cette chanson française nourrie à la sono mondiale, Jean Racine, né au Sénégal, sort un premier album intitulé Ivre du son.

Influencé par Bob Marley, Keziah Jones, Ben Harper ou Tété, ce chanteur-guitariste a voulu que son album unisse, à la façon d’un journal musical, deux versants de sa personnalité, deux états qui lui sont chers, le sensible et l’engagé, le personnel et l’universel. Découverte.

Votre histoire personnelle en quelques mots ?
Jean Racine : Je suis né et j’ai grandi à Kaolack au Sénégal. A l’âge de 19 ans, je suis parti à Dakar, avant d’arriver en France deux ans plus tard [en 2001, ndlr] pour suivre des cours dans une école de commerce à Strasbourg. En 2005, je débarque à Paris pour un stage de fin d’études.

Qu’est ce qu’on écoute quand on grandit au Sénégal ?
Dans ma famille, on écoutait de tout. Je baignais dans cette culture africaine faite de Ismael Lô, Youssou N’Dour et Fela. J’écoutais aussi beaucoup de soul et de musique américaine, du reggae et de la chanson française avec Gainsbourg notamment. Mon éclectisme vient de ma famille.

Comment vient-on à la chanson ?
Depuis tout petit, j’aime traduire en mélodie, les émotions que j’ai. A l’époque, je le faisais en reprenant les chansons de Bob Marley. Tout va réellement se passer à mon arrivée en France où j’utilise la même stratégie de traduction. Tout ce que je vis, je le transforme en mélodies et en mots. Sauf que cette fois, je le fais avec quelque chose de nouveau qu’on m’a offert, une guitare. Donc, parallèlement à mes études, je commence à composer des chansons, chez moi, tranquillement. Plus tard, lors de mon arrivée à Paris, je rencontre dans la rue un garçon qui chante No Woman, No Cry de Bob Marley. Je me joins à lui.

Et s’il n’y avait pas eu cette rencontre, jamais je n’en serai là. Je suis quelqu’un de timide et me retrouver à chanter avec lui dans les rues, c’était découvrir un nouvel univers. Génial ! Pendant une année, je ne fais que ça, je joue, je compose, je fais des maquettes, et je finis par me faire découvrir. Tout m’est tombé sur la tête, comme ça, du jour au lendemain.

Est-ce que jouer dans la rue a eu une influence sur votre album ?
Certainement. J’ai structuré et construit la presque totalité des titres dans la rue. Au début, c’étaient des mélodies, un couplet, un refrain, puis ils ont évolué, grandi à son contact. Pour accrocher le public, je devais introduire des gimmicks vocaux récurrents, de la simplicité, de l’immédiateté. Ces obsessions se retrouvent encore dans ma musique.

Votre album est à la fois revendicatif et personnel…
Quand on m’a signé, le réflexe a été de faire un album mettant en avant des chansons militantes parce que je suis un Africain et que je ne voulais pas perdre de temps avec autre chose que du militantisme. Je me suis vite rendu compte que c’était une erreur. J’ai alors pensé ce disque à la manière d’un journal musical. Dans ce mot journal, il y a une dimension personnelle et les chansons d’amour, de rupture, de chagrin sont parties intégrantes de cette optique-là. J’ai commencé avec des titres engagés, Born in Africa, Etrange ère, Le roi est sourd avant de faire d'autres chansons qui parlent avec simplicité d’amour, de mes peurs, comme Le grand vide, Faisons l’amour ou Je suis fou.

La conscience politique et l’engagement semblent être des notions importantes pour vous ?
J’ai grandi dans un pays pauvre et forcément j’ai cette conscience qu’il existe beaucoup d’injustices dans ce monde. L’Afrique a besoin de la culture, l’Afrique a besoin que ses artistes en disent du bien. Je sais que je ne peux pas changer les choses mais c’est néanmoins essentiel pour moi d’en parler. J’ai envie de faire tout ça, de rester simple et de crier.

Pourquoi avoir choisi New York pour enregistrer cet album ?
Pour avoir un son et travailler avec Henry Hirsch (producteur de Lenny Kravitz notamment). J’avais de grandes exigences quant au choix du réalisateur. Je voulais un son mat pour les sessions rythmiques, à l’image de ce qu’il se faisait dans les années 70 et les disques Motown et de l’autre, des guitares très modernes.

Comment s’est déroulé l’enregistrement ?
J’ai découvert une nouvelle façon de travailler. Henry passait beaucoup de temps à faire que chaque chanson ait sa propre identité sonore. On travaillait 13 heures par jour. Cette obsession du son est d’ailleurs à l’origine du titre de l’album "Ivre du son", qui n’a pas grand lien avec le morceau du même nom.

Pourquoi avoir choisi de chanter certains titres en anglais ? Par timidité ?
Ce n’est pas que par timidité. Je fais depuis toujours des reprises de titres en anglais et je tenais à chanter dans cette langue sur l’album. Mais surtout pour un titre comme Born in Africa qui traite du racisme, l’anglais me permettait de ne pas dire clairement les choses. Je veux être militant mais je n’ai pas envie de choquer.

Quel est le plus fort héritage présent dans votre musique ? Anglo-saxon, français, africain ?
J’ai voulu tout mettre dans cet album. On peut y ressentir un peu d’Afrique, un peu de chanson française, un peu d’anglo-saxon. Mais il est vrai que la source de cet album, même si je n’ai pas utilisé la langue, c’est l’Afrique. Pour moi, j’entends l’Afrique.

A t’on déjà un modèle de carrière quand on s’appelle Jean Racine et qu’on sort un premier album? ?
Je ne me projette pas trop. J’aime beaucoup le parcours de Tété ou de Ben Harper, c’est vrai. Mais ce que je veux surtout, c’est me battre pour avoir la maîtrise des choses. Je veux que mes projets soient des projets que je maîtrise du début à la fin. Cette maîtrise, c’est tout ce qui importe.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

salut Jean Racine ça me fait plaisir de lire un article sur toi. Cela motive de savoir qu'il est bon de poursuivre ses rêves je t'en félicite et je te souhaite beaucoup de succès. une strasbourgeoise

 
{http://www.leboytown.blogspot.com/}.