Les cérémonies funéraires de plus en plus festives

Ce sont des actes que les morts n’apprécieraient guère. A peine enterrés, la fête commence dans les maisons mortuaires. Le plus indécent, ce sont les rivalités dans l’habillement, le « jaxal », une sorte d’appui financier qu’on donne aux membres de la famille du ou de la défunte, les petites discussions en groupe, les histoires de repas, etc. Il y a un côté très indécent dans les cérémonies funéraires. Elles deviennent de plus en plus festives.

L’histoire est vraie. Un vieux père de famille, environ 65 ans, connu pour sa piété, très respectueux des principes de sa religion, est revenu un jour chez lui, très en colère. Il prend le soin de convoquer tous les membres de sa famille et de leur tenir les propos suivants : « S’il m’arrivait de mourir avant vous, je ne pardonnerai jamais à celui qui prendra la peine d’acheter même un mouton pour mes funérailles. Faîtes juste le nécessaire. Tout le reste est accessoire ». Après son discours empreint de fermeté, les membres de la famille se mirent à pleurer. Ils pensaient que leur père allait mourir le soir, lorsque le soleil se serait couché. Car, en effet, ils n’ont rien compris de ce si ferme discours...

Il ne servait pas d’au revoir pour la famille. Cela, les membres l’ont compris lorsque, à tête reposée, leur vieux père raconte son expérience à son épouse. Il revenait d’une maison mortuaire et était « trop désolé et fâché par la situation qu’il y a vécu ». « Des discussions irrespectueuses à bâtons rompus, des éclats de voix, une sorte de concours d’habillement entre femmes, des repas du tonnerre, des jaxals dont les sommes sont divulguées en public et relevées sur un carnet, Ah, que c’était triste ! ». Telle était la confidence de ce vieil homme qui venait de vivre une telle expérience.

Manifestement, ce vieil homme vient de découvrir une pratique devenue à la mode. En vérité, les cérémonies funéraires sont devenues très festives. « C’est un constat pertinent et d’actualité. Car de plus en plus, on a l’impression que la notion de pensée pieuse n’a plus de sens », regrette un homme d’âge mûr. « Quand on ne parvient plus à faire la différence entre deuil et baptême, c’est qu’on est arrivé à un stade très délicat », commente encore notre interlocuteur.

« C’est à l’occasion des cérémonies funéraires que l’on porte les plus beaux habits, les femmes en profitent pour, en groupes, parler de tissus à la mode, de nouvelle gamme de produits, de bijoux, de chaussures et de plusieurs problèmes qui ne les regardent pas », déclare une personne interrogée, très désolée des « situations de médisance qui ont cours dans les cérémonies ». Une fois l’enterrement terminé, la fête commence. Et, généralement, des membres de la famille du défunt sont coopératifs.

Plusieurs de nos interlocuteurs indexent les femmes comme principales responsables dans de telles situations. « Les hommes, après avoir une fois assisté à l’essentiel, se retirent pour la plupart. Les femmes restent pour récupérer leur jaxal dont le montant est noté sur un carnet. Cela est une forme de dette à rembourser à somme équivalente à la personne qui l’a remise quand son tour arrive un jour », témoigne une griotte, habituée de telles cérémonies. Des fois, on constate que la personne défunte aux funérailles faramineuses peut être restée des années, terrassée par une maladie, sans que personne ne daigne lui rendre service en achetant le plus petit médicament. Que dire des bœufs qu’on tue à tour de bras ? Des tentes qui occupent toutes les parties d’une rue ?

Source: Le Soleil

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