Lettre ouverte à Nicolas Sarkozy, Président de la République française. Le chanteur Ménélik s’insurge contre la Françafrique. Pour que les relations entre la France, sa partie d’adoption, et son continent d’origine évoluent et deviennent enfin équitables, il appelle à une mobilisation des artistes, de sportifs et de toutes les personnes convaincues et de bonne volonté. Coup de gueule.
Monsieur le Président de la République,
Artiste, je suis originaire d’Afrique d’où je tire mon nom de scène et puise une partie de mon inspiration. Désormais, je vis en France, ma patrie d’adoption. Pour autant cet éloignement ne me laisse pas insensible au devenir du continent qui m’a vu naître. Bien au contraire. C’est donc avec une attention particulière que j’ai écouté le discours que vous avez prononcé il y a quelques jours au Cap, en Afrique du Sud.
Ce discours, Monsieur le Président, est un pas dans la bonne direction. Sur le papier. Il vous reste maintenant le plus difficile : passer aux actes. Or, permettez-moi d’être prudent. Les étagères de l’histoire sont pleines de discours truffés de bonnes intentions demeurées lettres mortes, du discours de La Baule en 1990 à celui de...Cotonou. C’était en mai 2006. Alors candidat, vous promettiez déjà la rupture dans les relations France-Afrique. Depuis votre élection, c’est la continuité qui prévaut ! Du discours de Dakar en juillet dernier à l’intervention française au Tchad il y a quelques semaines.
Au Cap, vous nous avez une nouvelle fois promis le Grand Soir. En disant vouloir « refonder les relations entre la France et l’Afrique », j’imagine que, ce coup-ci, vous étiez sincère. Je vous prends donc au mot. Moderniser les relations France-Afrique, c’est une nécessité ; les adapter à la réalité du XXIème siècle, aussi : celle d’un continent de plus en plus attractif, ouvert à d’autres partenaires, qui affiche un taux de croissance supérieur à 6 % par an.
Pour « un vrai changement : en actes, pas seulement en paroles »
Cette croissance, pour être véritablement durable et profitable à tous, doit d’abord émaner des Africains eux-mêmes. Le développement de l’Afrique, dans les années à venir, passe par ses forces vives, une jeunesse au potentiel énorme, une nouvelle génération de dirigeants et d’entrepreneurs dynamiques qui s’étoffe peu à peu, et qui est la plus à même de créer la richesse et les emplois dont ce continent a besoin. Mais ces forces vives ne pourront pleinement s’exprimer tant que la France continuera de porter à bout de bras des régimes à bout de souffle, de soutenir des dirigeants qui font le malheur de leur peuple.
Ça n’est plus acceptable, Monsieur le Président ! Et d’ailleurs, ça n’est plus accepté aujourd’hui , tant par les jeunes générations d’Africains que par l’opinion publique française. La France doit tourner la page de « l’Afrique à Papa ». Une bonne fois pour toute. En tant qu’artiste engagé, je suis décidé à mener ce combat.
Mais parce qu’on est jamais aussi fort qu’à plusieurs, je lance ici un appel. Un appel apolitique, non partisan. Un appel à tous les artistes et sportifs engagés, français et africains, de sang ou de cœur. L’heure est venue de nous rassembler, de prendre nos responsabilités et de mettre notre notoriété au service du renouveau des relations entre la France et l’Afrique. Ensemble, exigeons le changement. Le vrai changement : en actes, pas seulement en paroles.
M. Sarkozy a dit : « je dirais ce que je fais et ferais ce que je dis ». Et bien, je vous prends au mot Monsieur le Président.
D’ici là, tous ensemble, restons vigilants.
Source: Afrik.com
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