Khouman : «Le rap n’est que le reflet de la société»

Khuman est une voix autorisée. Il a vécu toutes les tendances du mouvement Hip-Hop et aujourd’hui, c’est une référence. Il explique ici comment le rap est arrivé à cette tendance.

Comment expliquez-vous l’omniprésence de Dieu dans le discours du rap ?
C’est quand même bizarre, mais c’est tout à fait normal. On est dans une société et une culture très religieuses. Cette culture se ressent forcément dans le rap. Depuis 2000, il y a de plus en plus de jeunes qui retournent vers la spiritualité. Cela se constate chaque jeudi soir, les jeunes se regroupent dans la rue pour des séances de Zikr dans toute la ville et parmi eux, il y en a qui sont dans le mouvement Hip-Hop.

Donc, ils sont obligés de relayer le message de leur guide religieux. Le rap n’est donc que le reflet de la société. Si les jeunes s’adonnaient ouvertement à l’alcool et à la drogue, cela se serait reflété dans les productions du mouvement. Ou dans la politique. Mais les jeunes se sont réfugiés dans la religion et cela se reflète dans les textes.

Pourtant, ce sont des anciens, des membres du Old school que l’on retrouve de plus en plus en dans cette spiritualité?
C’est tout le monde maintenant, il n’y a pas que les anciens. Mais je pense que cella montre qu’il y a une maturité dans les textes, une certaine maturité dans la direction artistique. L’homme est le reflet de la société. Ce n’est pas le discours qui a changé. Lorsque vous écoutez Bibson, il fait toujours du Clash et il représente toujours la rue, mais il touche un public plus large, plus âgé, à qui il faut parler de religion. Dans l’album 100 commentaires, on a parlé de religion mais essentiellement des aspects négatifs liés à sa compréhension et à sa pratique.

N’est-ce pas à ce niveau que se situe le problème ? Ne sont-ils pas en train de dénaturer l’essence du rap si l’on considère que le rap est discours engagé, remises en cause, contestations ?
C’est vrai ! On peut le voir sur cet angle, mais le Hip-Hop n’est pas que cela. C’est vrai que c’était à la base une musique de contestation, mais cela a tellement évolué que c’est devenu une musique comme toutes les autres. A la fois contestatrice et «constatatrice». Elle sert de repères à certaines personnes. Les gens qui n’achètent pas les journaux pour savoir ce qui se passe dans le pays, peuvent retrouver toutes les informations dans les albums hip hop. Dans le Hip hop tu retrouves les zikr, le théâtre, l’actualité internationale, tu peux y voir et avoir une idée ou une image de la société. (…) On ne peut continuer de parler du Hip hop comme d’une musique de gauche, il peut être une musique d’amusement, d’éducation, comme il peut être une musique spirituelle.

N’est-il pas mieux aujourd’hui, pour ne pas heurter les sensibilités, de faire la part des choses entre le rap qui est une musique et la religion ?
C’est un débat ! Personnellement, je préfère rester global dans mes chansons. Avec cela, je suis certain de toucher le plus de personnes possible. Par contre, si je me radicalise, je minimise mon champ d’action, le rayon de perception de mes messages. Je vous donne l’exemple de notre groupe. Au début, on s’appelait Pee froiss muslims, puis on a enlevé «muslims», parce qu’on s’est dit qu’il n’y a pas que les musulmans qui nous écoutent. (…)

Source: Le Quotidien

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