Ousmane Sembène mérite une statue et un musée

L’universitaire sénégalais Moussa Sow, professeur d’études francophones au New Jersey, a estimé qu’il faudrait élever une statue en l’honneur de Sembène Ousmane et donner son nom à un musée en signe de reconnaissance de son oeuvre.

‘’Sembène représente, pour nous autres qui avons étudié de près son œuvre, une bibliothèque inépuisable, une référence culturelle de la trempe de Cheikh Anta Diop’’, a dit M. Sow dans un entretien accordé à l’APS à l’occasion du premier anniversaire du cinéaste, décédé le 9 juin 2007.

Pour rendre un hommage mérité à Sembène, ‘’il faudrait élever une statue à son honneur, créer un musée portant son nom avec une salle de projection, inviter dans les médias ceux qui connaissent l’homme et son œuvre pour en parler’’, a-t-il ajouté.

Selon Moussa Sow, auteur d’une thèse de doctorat sur Sembène, il est ‘’important’’ d’organiser un hommage national à l’occasion du premier anniversaire de la mort du cinéaste.

‘’Sembène est le père du cinéma africain. Il a très tôt compris la dimension idéologique et politique de l’image. Ainsi, il s’est battu pour africaniser le regard, afin de sortir de l’image coloniale et stéréotypée que l’Occident nous renvoyait à travers son cinéma’’, a-t-il expliqué.

Il a ajouté que, de son vivant, Sembène ‘’s’est donné la mission de réécrire l’histoire africaine grâce à l’outil caméra, dans le souci d’offrir une image plus humaine de l’Afrique et de redonner à la femme africaine sa véritable stature’’. Ce sont autant de raisons pour lesquelles ‘’des légendes comme Sembène doivent être connues de tous et leur œuvre enseignée dans toutes les écoles’’.

Pour Moussa Sow, la télévision peut jouer un grand rôle dans cette tâche en ce sens qu’elle peut organiser un ‘’mois Sembène Ousmane’’ durant lequel toute sa filmographie pourrait être diffusée.

‘’Peu de ses films sont connus de la population sénégalaise. C’est le moment de les montrer’’, a suggéré, Moussa Sow qui a soutenu sa thèse sur Sembène, en 2005, à l’Université d’Etat de Louisiane, dans le sud des Etats-Unis.

S’agissant de la relève, l’universitaire estime qu’il n’y a pas de souci à se faire à ce niveau. ‘’La relève sur le plan humain est certainement bien assurée. Le Sénégal regorge de talentueux cinéastes qui, malgré les problèmes économiques, continuent à faire des films’’, a-t-il indiqué citant les réalisateurs Moussa Sène Absa, Ben Diogoye Bèye, Mansour Sora Wade, Joe Gaye Ramaka.

Moussa Sow a toutefois souligné les problèmes liés à l’inexistence d’infrastructures, précisant que c’est sur le plan structurel que la question se pose ‘’de la façon la plus aiguë’’. Il a déploré la disparition des salles de cinéma qui font place, depuis quelques années, à ces centres commerciaux.

‘’Il faudrait réfléchir à des moyens de financement viables, à des créneaux de diffusion autres que les salles de cinéma traditionnelles, infliger des peines sévères à ceux qui s’adonnent aux piratages des œuvres culturelles et artistiques, établir un réseau de distribution et de vulgarisation de nos œuvres culturelles chez nous.’’

M. Sow qui reconnaît avoir découvert le cinéma de Sembène aux Etats-Unis, a estimé que ‘’la densité de sa filmographie, son parcours hors du commun, et enfin son amour pour l’Afrique en général et le Sénégal en particulier font qu’il est incontournable pour toute étude qui se veut sérieuse sur le cinéma africain et sénégalais’’.

‘’Le défi que Sembène lance aux cinéastes sénégalais, c’est celui de faire un cinéma de haute facture qui allie à la fois une valorisation de notre patrimoine culturel, une critique sans complaisance de nos sociétés, tout en s’efforçant de distraire les spectateurs’’, a-t-il poursuivi.

La thèse de doctorat de Moussa Sow porte sur le thème : ‘’Cinéma sénégalais : évolution thématique du discours filmique dans les œuvres de Sembène Ousmane, Djibril Diop Mambety, Moussa Sène Absa, Jo Gaye Ramaka et Alain Gomis’’.

Le propos de la thèse était selon le professeur Sow, ‘’d’étudier le discours filmique du cinéma sénégalais en remontant de la figure de l’Africain à celle du Sénégalais, de relever les éléments culturels qui font de ce discours un discours national qu’on peut comparer aux discours filmiques camerounais ou burkinabé, tout en dépassant le débat légitime sur la division artificielle de nos frontières’’.

La thèse paraîtra d’ici la fin de l’année 2008, sous forme de livre, sous le titre de « Cinéma sénégalais ».

Source: APS

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